Folle histoire du monde (La)
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La Folle Histoire du monde révèle l'existence d'un facteur permanent décisif dans toutes les civilisations. Il s'agit de perturbations émotionnelles collectives, communes à une époque ou à une structure sociale particulière, et fondamentalement différentes dans les sociétés agricoles, industrielles ou actuelles. Ces perturbations ont partie liée avec l'organisation des caractères telle qu'elle se forme dans les névroses, au point qu'on peut parler de civilisations phobiques, obsessionnelles, ou hystériques. Ces "socionévroses" affermissent les civilisations qui les produisent mais elles sont susceptibles, comme l'avait observé Pavlov à propos des réflexes conditionnés, de se désagréger dans certaines conditions environnementales. De telles conditions se trouvent justement réunies aujourd'hui.
"Les structures sociales d'une civilisation, qu'elle soit agricole-impériale, industrielle-marchande ou spectaculaire-mafieuse, par les exigences morales et les comportements qu'elle impose, sont toujours ressenties comme de pénibles entraves aux désirs individuels du vivant, dans le moment de leur surgissement et dans la revendication immédiate ou même différée de leur satisfaction. Il existe alors un conflit intime entre le sujet individuel, ses émotions, ses passions, d'une part et, d'autre part, les comportements exigés par l'organisation sociale, comportements que sa conscience approuve et dont elle intériorise la nécessité. En dehors du suicide qui permet d'en finir avec cette vie déchirée, une seule alternative se présente : refuser les impératifs moraux ou vivre en permanence avec ce conflit lancinant, en s'efforçant même de le nier. Le rejet de tels impératifs peut prendre la forme de la folie individuelle, ou de "perversions" morales et comportementales. L'une et l'autre conduisent habituellement à l'enfermement psychiatrique ou judiciaire. Il peut prendre aussi la forme d'une résistance active et consciente à une telle organisation sociale si manifestement opposée aux exigences du vivant. Ces diverses formes de refus et de résistance sont toujours très minoritaires dans les périodes de stabilité sociale. La réponse la plus commune alors est l'acceptation des impératifs sociaux, la soumission aux lois morales, l'intériorisation de ces lois et la négation du conflit lui-même. On appelle cette intériorisation une névrose."
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