Lautman
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Né en 1908 dans une famille juive originaire de Roumanie, Albert Lautman (1908-1944) a suivi un parcours non seulement analogue, mais directement associé à celui de Jean Cavaillès (1903-1944), son ami et aîné de quelques années. Comme lui normalien et auteur de deux thèses de philosophie des mathématiques, Lautman fut résistant et fusillé par l'occupant en 1944, dénoncé pour sa participation à l'organisation d'évasions en Espagne d'aviateurs alliés et de Français.
Très averti de la science de son temps, de la nouvelle physique mais surtout des mathématiques dans leur éclosion de l'entre-deux-guerres, il a laissé une œuvre dense, louée en son temps par Bachelard (1884-1962), aux influences diverses allant de la philosophie générale, principalement Platon (427-348 avant J.-C), Kant (1724-1804), Hegel (1770-1831), le premier Heidegger (1889-1976), aux mathématiques avec des scientifiques comme Gauss (1777-1855), Poincaré (1854-1912) et Cartan (1869-1951), en passant par l'épistémologie de Herbrand (1908-1931), Wittgenstein (1889-1951) ou Hilbert (1862-1943).
L'intuition fondamentale de Lautman, qui fait de son œuvre une porte d'entrée passionnante, d'autant plus importante qu'elle est très lisible et certainement pédagogue, pour l'exploration du continent mathématique, est que derrière les structures mères des théories mathématiques, on retrouve Platon, raison pour laquelle, dès lors qu'on se donne comme objet la connaissance de la réalité physique, il convient de « refaire le Timée ». Pour Lautman, cela revient à chercher au sein des Idées elles-mêmes, les raisons de leur application à l'univers sensible, c'est-à-dire à repenser, à la façon du Timée de Platon, la façon dont le réel incarne et réalise des structures supérieures de type dialectique, dont le plan mathématique, intermédiaire, est l'émanation. La force de Lautman réside dans sa capacité à relier et confronter avec une grande rigueur ce dispositif philosophique a priori fort éloigné des réalités scientifiques, dans le contexte philosophique de son époque, à la révolution mathématique qu'ont constituée, conjointement, le développement de l'analyse fonctionnelle, de la théorie des structures algébriques et de la méthode axiomatique hilbertienne. Son œuvre a influencé des penseurs comme Gilles Deleuze (1925-1995) et Alain Badiou et des mathématiciens comme Jean Dieudonné (1906-1992) ou Fernando Zalamea.
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