Homme qui aimait les îles (L')
Homme qui aimait les îles (L')
Lawrence, D.H.  
Gillyboeuf, Thierry (Préface de) 
Delavallande, Catherine (Traduit par) 
  • Éditeur : Arbre vengeur (De L')
  • Collection : Hors-collection
  • EAN : 9782916141831
  • Format : Broché
  • Pages : 96
  • Prix : 16,95 $
  • Paru le 14 mai 2012

Œuvre de la toute fin de sa vie, The man who loved islands est une longue nouvelle qui en dit très long sur le destin de son auteur qui semble annoncer sa chute prochaine. Écrite en 1926, elle a été publiée aux États-Unis en 1928. Un individu aux penchants à la fois idéalistes et misanthropiques acquiert à 35 ans une île dans l’intention de la transformer, de créer un univers dont il serait le maître. Rêvant d’autarcie il voit peu à peu fondre ses économies car son exploitation agricole ne rapporte pas assez, d’autant qu’il se fait gruger par ses domestiques. Il se résout à vendre son île pour s’en acheter une autre, plus petite, avec moins de serviteurs et moins d’ambitions. Le voici, sur une terre balayée par les vents, qui ne ressent rien de ce qu’il espérait : ni bonheur, ni désir. Désabusé, il fait un enfant à la fille de sa gouvernante, et cela achève de tuer en lui toutes les envies qui cèdent la place à une indifférence si immense, si atroce qu’il doit s’enfuir à nouveau, se réfugier dans une troisième île, qui n’est plus qu’un rocher au milieu de la mer agitée, où il vit dans le dénuement, hanté par ses obsessions. Il succombe à la folie entourés de moutons qui bêlent sans fin et finit par mourir de froid dans son abri où le feu s’est éteint.
 
«L’homme qui aimait les îles est bien entendu Lawrence lui-même ; sa nouvelle est une allégorie de ses perpétuelles errances entre les cultures et les systèmes philosophiques. » (F.Sjöberg) Nouvelle limpide qui suit une trajectoire infaillible, morceau de pure noirceur, ce texte en dit beaucoup sur la personnalité de ce grand écrivain méconnu et sur ses obsessions (lui parlerait de névroses, un mot qui revient souvent dans ses essais) : comment atteindre la plénitude loin des hommes, comment être à soi-même un territoire fini.
 
Le héros de Lawrence botanise beaucoup au début de son aventure insulaire, comme s’il fallait ordonner le chaos d’un univers infini et le contenir dans des livres et des listes. Herboriser lui permet d’atteindre un équilibre, d’avoir la maîtrise de quelque chose, même insignifiant. Comme le remarque Fredrik Sjöberg qui évoque cette nouvelle dans un roman, il est boutonologue (science du futile), qui a besoin de tout contrôler et tout savoir d’une chose au risque d’approcher une forme de démence, à la différence du cartographe qui reproduit à l’échelle sans vouloir l’exhaustivité. Récit d’un fol échec, d’une ambition simple et pourtant démesurée, cette nouvelle a le pouvoir des récits qui cherchent à atteindre une vérité sans vouloir la formuler.

AUTEUR(S)

La brève carrière littéraire de David Herbert Lawrence (1885-1930), devenu célèbre grâce à L’Amant de Lady Chatterley lui vaut une notoriété peu en rapport avec la véritable importance de son œuvre. Car derrière le scandale un peu excessif apparaît un écrivain qui « possédait un don particulier et caractéristique : il était extraordinairement sensible à ce que Wordsworth appelait “les modes inconnus de l’être”. Il était toujours profondément conscient du mystère du monde… » (A. Huxley). Ce regard ultra-sensible sur les êtres, la nature, le rapport aux éléments et à la violence de la vie traverse toute son œuvre. De lui il serait urgent de reconnaître l’importance du romancier (Femmes amoureuses, Amants et fils, L’Arc-en-ciel, Le serpent à plumes), ses récits de voyage (Crépuscule sur l’Italie, Sardaigne et Méditerranée, Croquis étrusques), ses essais et, bien entendu, totalement négligées, son œuvre poétique et ses nouvelles. Et on évoque à peine son œuvre de peintre.




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