La distinction entre l'avenir radieux dont le Québec croyait célébrer le commencement il y a un demi-siècle et le moyen âge dont il prétendait du même coup s'affranchir a beau être simpliste et manichéenne ; elle n'en fut pas moins profondément ressentie comme le passage d'une société dominée par la peur à une société proprement lyrique. Mais il n'est pas certain que la peur soit moins favorable que le lyrisme à l'épanouissement de l'intelligence et de la beauté romanesques ; les romanciers québécois de la Grande Noirceur réservent des surprises au lecteur curieux qui les aborde avec un regard naïf, sans égard aux idées reçues et aux schématisations scolaires. On trouve dans ce corpus non seulement des livres à moitié réussis qui n'en méritent pas moins d'être lus avec attention, mais aussi des romans d'une grande beauté dont l'humour sombre et subtil brille aujourd'hui d'un éclat singulier.

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