Devoir d'intervenir?
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Depuis le Moyen Âge, plusieurs communautés religieuses cohabitent dans la région du Mont-Liban. Les plus importantes sont celle des Maronites (chrétiens) et celle des Druzes (musulmans). Organisées de façon féodale, elles se sont combattues à plusieurs reprises pour obtenir le contrôle du territoire. Sous administration ottomane depuis le XVIe siècle, le Liban est coupé en deux entités politiques en 1841 : le nord devait être dirigé par les chrétiens, le sud par les Druzes. Mais ces derniers imposent par la force leur autorité aux maronites du sud. Le pillage de Deir el Kamar en 1845, la première exaction commise par les Druzes contre les maronites, a lieu sans que les Ottomans interviennent.
En mars et en avril 1860, un couvent est pillé, un prêtre et trois chrétiens sont assassinés. Les autorités turques laissent faire. Les Maronites exercent des représailles. Les Druzes pillent alors plusieurs villes chrétiennes, massacrent des milliers de Maronites.
L’émotion est grande en Europe. La France décide d’intervenir. Mais ses intérêts et ceux de l’Angleterre divergent. L’envoi d’un corps expéditionnaire, constitué pour moitié de soldats français, n’aura lieu qu’après un bras de fer diplomatique. L’accord qui le conditionne restreint considérablement la marge de manoeuvre des troupes engagées. L’intervention se solde par un échec militaire. Mais sa principale originalité se situe ailleurs, dans l’importance de l’aide qu’elle a permis d’apporter aux populations sinistrées du Liban. Conséquences judiciaires et politiques de l’intervention européenne, enfin : comment ont été déterminées les responsabilités dans les massacres ? Comment les présumés coupables ont-ils été jugés ? Quelle solution politique les Européens – mais aussi les Ottomans – mettent-ils en place pour stabiliser le Mont-Liban ?
À travers le récit mouvementé de ces événements, entre rivalités franco-britanniques et conflit culturel, on mesure combien cette expédition au Liban, la première intervention humanitaire, a soulevé, pour les contemporains eux-mêmes, des questions de souveraineté, de légitimité et de droit international, d’une brûlante actualité.
Docteur en histoire, Yann Bouyrat consacre ses travaux à l’étude des relations entre la France et l’Empire ottoman au XIXe siècle, aux questions d’ingérence pour raisons humanitaires, ainsi qu’à l’orientalisme dans la presse et les récits de voyage.
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