Pourquoi je ne suis pas une Indienne
Pourquoi je ne suis pas une Indienne
Poirier, Daphnée  
  • Éditeur : Écosociété
  • Collection : Parcours
  • EAN : 9782897198039
  • Code Dimedia : 000227402
  • Format : Livre numérique EPUB
  • Thème(s) : DIVERS, LITTÉRATURE - FICTION & ESSAI, SCIENCES HUMAINES & SOCIALES
  • Sujet(s) : Autochtones, Biographie / Récit biogra., Essai - Divers, Histoire - Québec / Canada, Littérature québécoise, Sciences humaines - Divers, Sociologie / Anthropologie
  • Prix : 14,99 $
  • Paru le 7 juin 2022
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EAN: 9782897198039

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Une reconnaissance juridique est-elle suffisante pour conférer une identité culturelle ? Et lorsqu’on a été assimilé, peut-on revendiquer l’appartenance à une culture qui nous est étrangère ? Ce sont là quelques-unes des questions au cœur de la réflexion de Daphnée Poirier qui, dans cet essai intimiste puisant dans son histoire personnelle et familiale, interroge ce qui fait le propre de nos identités culturelles.
 
L’autrice le déclare d’entrée de jeu : « Je ne suis pas une Indienne. » Pourtant, il lui serait légitime de revendiquer ce statut juridique, issue qu’elle est d’une famille métissée dont une branche de la lignée familiale est effectivement d’origine Abénaki. Une filiation qui a cependant longtemps fait l’objet d’un tabou familial, jusqu’au décès du grand-père « Blanc ». Si certains membres de sa famille ont depuis revendiqué ce statut, c’est un pas que l’autrice n’ose franchir, jugeant ne pouvoir prétendre appartenir à « l’autochtonie canadienne » par-delà le statut juridique. C’est que le processus de valorisation d’une identité collective dépasse largement la capacité législative d’un État. Les lois ne peuvent pas à elles seules redonner à une personne un ancrage identitaire.
 
Essai au titre audacieux qui pourrait être reçu par certains comme une provocation, il attache plutôt une grande importance au sens des mots. L’affirmation par la négative de l’autrice sous-tend une situation au conditionnel, c’est-à-dire à un « ce que je pourrais être… ». Au Canada, une telle affirmation est lourdement chargée socialement et historiquement, le terme « Indien » référant avant tout à un statut juridique issu de la Loi sur les Indiens de 1876 et dont les critères sont très circonscrits. Une situation qui fait que sur le plan légal, les membres des Premières Nations ne sont pas tous Indiens, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas tous le statut d’Indien.
 
Ce pourrait être le cas de l’autrice. Mais loin d’elle l’idée d’être honteuse d’appartenir à ce statut, elle serait plutôt tentée d’affirmer qu’elle est davantage honteuse de ne pas l’être, affligée par sa méconnaissance de l’autochtonie. Car bien qu’étant une femme issue d’une lignée qui a été métissée, comment envisager la possibilité d’obtenir de manière légitime le statut légal « d’Indien », alors qu’on ne connaît rien de la culture des peuples des Premières Nations hormis les lieux communs et les clichés enseignés à l’école et à la télévision. Un statut légal ne peut rendre des centaines d’années de culture et d’histoire qui ont été enlevées, auxquelles l’autrice est étrangère ou qu’elle a à peine effleuré sa vie durant. Son malaise est donc grand. Qui plus est dans un contexte qui nous voit nager dans les eaux troubles des suspicions identitaires. Qui est légitime de revendiquer son appartenance à l’autochtonie? Qui peut prétendre avoir des ascendances autochtones sans être scruté et taxé d’usurpateur identitaire? Qui est légitime de parler « au nom » de l’autochtonie sans se faire reprocher de louvoyer avec l’appropriation culturelle?
 
 Loin de vouloir chercher à poser un jugement sur la légitimité ou non de telle ou telle pratique de revendication identitaire, l’autrice cherche en fait, en filigrane de sa propre histoire, à analyser les ressorts sociaux et institutionnels qui nous ont plongés dans cette situation. Soit un système colonial qui prévaut encore au Canada, et qui a contribué à l’émergence de différents usages et pratiques qui consistent à essentialiser et à instrumentaliser une identité. Surtout que l’une des stratégies pour trancher entre l’un « qui dit vrai » ou l’autre « qui dit faux » ou « qui aurait raison de prétendre à » repose entre autres sur le fait de recourir à des outils génétiques et généalogiques. Le « sang Indien » devient un symbole très fort. Il est en quelque sorte un des outils ultimes afin de prouver hors de tout doute la véracité des prétentions à l’identité autochtone.
 
 Pourquoi je ne suis pas une Indienne est une réflexion profonde sur le grand et complexe thème de l’identité et surtout la difficulté, au Canada, que pose la sortie d’un rapport colonial aux Autochtones. Car reconnaître aujourd’hui la richesse des cultures autochtones, c’est en même temps reconnaître que nous avons collectivement nié ces identités trop longtemps; que nous avons participé et été témoins d’un génocide culturel, d’un ethnocide qui s’est déroulé à nos portes, dans nos communautés, dans nos familles.
 

AUTEUR(S)

Daphnée Poirier détient un doctorat en sociologie de l’Université du Québec à Montréal qui lui a permis de publier une thèse sur l’identité des personnes sourdes. Préoccupée depuis longtemps par les tiraillements identitaires vécus par des populations marginalisées, elle s’intéresse ici à l’identité autochtone ou plutôt aux raisons pour lesquelles, malgré sa trajectoire personnelle et familiale, elle ne se sent pas légitime de revendiquer cette identité. Elle habite « Sutton, terre des Abénakis », un petit village logé dans le massif des monts Sutton qui fait partie de la Réserve des Montagnes-Vertes. Pourquoi je ne suis pas une Indienne est son premier essai.
 
 




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